Les Coopératives Jeunesse de Services : une initiation au pouvoir d’agir ?
Le cycle de rencontres Les Dialogues de la Recma recevait le 8 novembre 2022 Alexandrine Lapoutte, Maître de Conférences en Sciences de Gestion à l'Université Lumière Lyon 2, pour son article « Coopératives Jeunesse de Services : une initiation au pouvoir d’agir » paru dans le N°365 de la revue (Juillet 2022). Hôte de la rencontre, Coop FR s’est réjoui des échanges sur la question de l’apprentissage de la coopération et du collectif.
L’objectif de l’étude réalisée avec Laetitia Planas, ancienne coordinatrice des projets CJS à Escale Création est de comprendre comment les Coopératives Jeunesse de Services favorisent le pouvoir d’agir des jeunes, en observant trois cas à partir du concept anglo-saxon de l’« empowerment » individuel.
LIRE LEUR ARTICLE, RECMA N°365, juillet 2022 [lien]
La participation, point fort des CJS
Les résultats montrent que la participation (droit de parole, débat, décision) et les compétences pratiques sont bien développées, notamment dans le domaine du numérique. L’estime de soi et la conscience critique sont plus complexes à aborder, malgré les attentes fortes des promoteurs des CJS. Si les coopérants améliorent l’estime de soi selon les profils et expérimentent effectivement l’entraide et leur capacité collective à agir, l’étude manque de recul pour constater des effets sur la conscience critique, au niveau du système économique et politique. Quant à l’autonomie financière, les coopérants constatent assez rapidement que la CJS améliore assez peu leur situation matérielle.
Est-ce que les CJS ont la capacité d’initier le pouvoir d’agir des jeunes ? Oui, répond l’autrice, mais elles ont surtout une finalité éducative. La CJS permet de leur faire découvrir les pratiques de la coopération, la diversité des formes entrepreneuriales. Elle est un véritable outil d’insertion, d’émancipation et un formidable espace d’expérimentation.
L’expérimentation au cœur de l’apprentissage
Si les jeunes coopérants étudiés provenaient à 90% de quartiers prioritaires de la politique de la ville, ils sont 60% au niveau national. Selon La Fabrique coopérative, 60% des jeunes au niveau national sont encore scolarisés, 20% en situation de décrochage.
Maryse Foligné, gérante de la coopérative régionale Le Cric qui accompagne les projets d’entrepreneuriat collectif a partagé les conclusions d’une étude sur l’utilité sociale des CJS. Importés du Québec il y a quasi 10 ans, la France commence à avoir du recul. Le volet expérimentation est l’une des dimensions les plus importantes pour les anciens coopérants. Des années plus tard, ils disent combien cette expérience les a transformés sur leur terrain d’engagement. Ils sont davantage capables de prendre la parole et d’être force de proposition. Ils appréhendent moins les difficultés du collectif. Enfin, ils connaissent mieux leur territoire et ses acteurs de terrain.
Des résultats nuancés par l’exemple du dispositif développé au sein de l’Université Paris 8 dans le cadre d’une coopérative éphémère d’étudiants. Le cadre « idéal » de l’expérimentation (autogestion, sociocratie…) dessert parfois l’insertion professionnelle des jeunes dans la « vraie vie » ! Sur les coopératives d’étudiants comme sur les Coopératives de Jeunes Majeurs, les tensions sont plus fortes.
La Fabrique coopérative qui fêtera les 10 ans des CJS à la Française en 2023 devrait pouvoir analyser l’impact des CJS sur les territoires, dans plusieurs régions qui ont déjà suffisamment de recul.
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