Les 130 ans du Crédit Coopératif sous le signe de l’engagement durable
« Nous pensons que le progrès humain résulte de nos choix. » C’est ainsi que Jérôme Saddier a introduit la soirée d’anniversaire du Crédit Coopératif qu’il préside. Depuis 1893, la banque de référence de l’économie sociale s’appuie sur le principe de coopération pour s’engager. « Nous choisissons ce que nous ne finançons pas. » a complété Pascal Pouyet, directeur général de la banque. Nicolas Namias, président du directoire de BPCE, a ainsi résumé l’identité du Crédit Coopératif au sien du groupe : « En tant que première banque de l’ESS et incarnation du modèle coopératif, le Crédit Coopératif a une empreinte et un impact dans l’économie française ».
« Une banque qui a toujours rêvé d’un monde différent » présente une vidéo rétrospective, de la Banque coopérative des associations ouvrières de production (BCAOP) à la Banque Française de Crédit Coopératif puis au Crédit Coopératif, en passant par la création de la Caisse Centrale de Crédit Coopératif qui unifie le mouvement coopératif à partir des coopératives de consommation en s’ouvrant à d’autres secteurs (artisanat, communautés de travail, pêche, le logement social, transport, commerce). 130 ans d’engagement qui rayonne au-delà, auprès des associations dans le secteur du tourisme social, du social et du médico-social, de la culture, du sport, et des mutuelles. En 2002, le Crédit Coopératif rejoint le groupe Banque Populaire, devenu en 2009 BPCE (Banque Populaire Caisse d’Épargne). Il est depuis 40 ans, le fer de lance de la finance solidaire.
À la veille de la COP 28, le Crédit Coopératif a choisi de célébrer son engagement durable pour un monde meilleur en invitant des personnalités éclairantes sur la question du changement climatique et de ses conséquences sociales. Plusieurs séquences ont ponctué cet anniversaire.
L’écologie, un nouvel imaginaire
« L’heure est venue » titre la première table ronde. Cyril Dion, écrivain, réalisateur et militant écologiste, et Cécile Duflot, directrice générale d’Oxfam France, font le constat d’une absence de vision sociale et d’imaginaire sur le futur « post-croissance ». Comment financer les besoins d’investissements non rentables dans la transition ? « On a besoin d’une finance patiente. Extrêmement patiente. » répond Jezabel Couppey-Soubeyran, économiste. Les témoignages d’André Dupon, président du groupe Vitamine T (comme Travail), et de Claire Thoury, présidente du Mouvement Associatif le démontrent, les gens s’engagent ! Mais comment passer d’une société engagée à une société politisée ?
Radicalité
Qu’en pensent « ceux qui font l’économie de demain » ? Les deux militantes d’Impact France, Eva Sadoun (Lita.co) et Julia Faure (Loom), l’ancienne et l’actuelle co-présidente du mouvement qui a vocation à faire « changer les règles du jeu économiques pour que la performance économique rejoigne l’intérêt général », sont convaincues par la nécessité d’une radicalité. Pour Eric Chenut, président de la Mutualité française, il faut « se redonner un projet de société » face aux ravages de la financiarisation. « Il faut permettre aux femmes et aux hommes de s’émanciper, s’élever à leur pleine citoyenneté. »
Fin du monde, fin du mois
« Justice sociale, justice environnementale : le face à face » a fait dialoguer d’une seule voix l’activiste Camille Etienne et Christophe Robert, directeur de la Fondation Abbé Pierre. Les plus fragiles sont les premiers à subir les conséquences des décisions prises au nom de la transition. Il faut « mettre les conditions du soutien pour qu’elles soient acceptables ». Une transition juste. « Fin du monde, fin du mois : même combat » Camille Etienne rappelle qu’elle a marché aux côtés des Gilets jaunes pour lutter contre le changement climatique. « Le kérozène n’est pas taxé ! » Un choix politique, dit-elle.
« Les coopératives, c’est pas fait pour les crises, c’est fait pour le progrès ! »
Un interlude bienvenu a dévoilé l’ancien stagiaire-mystère du Crédit Coopératif : François Hollande, ancien président de la République, qui lors de ses jeunes années a effectué un stage à la 4C. Occasion d’un échange avec Jérôme Saddier sur les enjeux et objectifs de la transition. « Monsieur le Président, est-ce pendant votre stage que vous avez décidé que la finance est votre ennemi ? » François Hollande a rappelé son attachement aux valeurs partagées par le Crédit Coopératif et le mouvement coopératif, de solidarité et de partage. Ce stage lui a permis de découvrir le monde de la coopération ouvrière, des Scop, et des coopératives de consommateurs.
Dans le discours du Bourget confie-t-il, il ne s’agissait pas de s’en prendre au système bancaire, coopératif ou non, qui va financer l’économie réelle, mais de chercher la finance saine. Pour l’ancien président, il faut trouver de nouvelles modalités de financement des transitions. Il y a aujourd’hui un besoin de radicalité ; il nous faut rendre le consentement possible vers un objectif qui nous rassemble tous.
40 ans de finance solidaire
Le Crédit Coopératif célébrait un autre anniversaire, celui du 1er fonds solidaire Ecofi, Faim et développement, 40 ans de finance solidaire. Elle permet de faire fructifier son épargne en lui donnant du sens (transition écologique, insertion, accès au logement ou à l’emploi) représente 26,3 Mds d’euros d’épargne solidaire. Elle génère 4,8 millions d’euros de dons aux associations et permet 841,5 millions d’euros de financements solidaires. Sylvie Bukhari de Pontual, présidente de la CCFD-Terre solidaire, Charles Lesage, administrateur de la Fondation Crédit Coopératif, et Patrick Sapy, directeur général de Fair, ont témoigné de son impact.
« Nous savons le même poème par cœur »
Le tableau ne serait pas complet si on ne mentionnait les pépites qui ont ponctué la soirée : Vincent Edin, journaliste et essayiste, en Jean-Laurent du Ruissellement, après une carrière dans les groupes cotés qui a monté son propre fonds « Cum volumus possumus » ; et Tiago Rodrigues, nouveau directeur du Festival d’Avignon dont la Fondation Crédit Coopératif est le principal mécène, qui a tenté de donner une note d’espoir : « Dans les moments de grande difficulté, il y a des valeurs essentielles invisibles qui nous rassemblent. Nous savons le même poème par cœur. »