Le COL
Au Pays Basque, et désormais en Béarn, Occitanie et Nouvelle-Aquitaine, le COL, une coopérative HLM sous statut de société coopérative d'intérêt collectif (Scic), explore en pionnière depuis plus de 70 ans les solutions qui permettent au plus grand nombre d'accéder à un logement.
Au sortir de la Seconde guerre mondiale il faut reconstruire et se reloger. Le mouvement des Castors réunit des personnes qui, ensemble, construisent des maisons, puis, les chantiers une fois terminés, tirent au sort quelle maison reviendra à qui. On ne construit pas pour soi, on construit pour tous sans savoir à l'avance si le mur qu'on bâtit sera celui de sa maison ou de son voisin. Bel exemple de solidarité et de partage !
Une forte demande... dans un contexte défavorable
En 1951, lorsque les Castors de Saint-Amand (à Bayonne) ont fini leurs maisons, ils décident de continuer à développer le logement sur leur territoire. Plus pour eux, mais pour les autres. Ils créent alors le Comité ouvrier du logement (COL) sous la forme d'une coopérative HLM. Depuis, plus de 6000 logements ont été créés permettant à autant de familles d'acquérir leur toit, auxquels il faut ajouter 2400 logements sociaux locatifs construits à partir des années 1990. Aujourd'hui, le COL et sa soixantaine de salariés (experts en montage d'opérations immobilières, prospecteurs fonciers, commerciaux, comptables, juristes, etc.) a essaimé depuis son fief basque d'origine à Pau (en 2011), à Bordeaux (2015) et Toulouse (2020). Jean-Baptiste Darroquy, responsable des ventes, explique que la demande en logements est plus importante que jamais : « Sur la côte atlantique, à la pression touristique s'est ajoutée depuis la crise du Covid et la crise énergétique liée à la guerre en Ukraine, celle de nouveaux arrivants télétravailleurs. Si vous ajoutez à cela les séparations et les divorces qui impliquent deux logements là où il n'y en avait qu'un, on comprend que les plus faibles revenus ont beaucoup de difficultés pour accéder à la propriété. Sans parler de l'augmentation des coûts de la construction qui ont explosé et des taux bancaires qui ont été multipliés par cinq ! »
Un montage juridique sophistiqué
Face à ces situations complexes, le COL répond comme il l'a toujours fait : en innovant. Pour développer son activité et augmenter son offre, il se transforme en Scic en 2013 : « Il nous fallait renforcer notre capital pour construire davantage et nous voulions resserrer nos liens avec nos partenaires, en particulier avec les collectivités. » Cette transformation, dans la continuité de la tradition coopérative du Comité, dope l'activité avec l'ouverture de nouvelles agences et la construction d'environ 400 logements par an. Mais le COL sait que s'il veut rendre accessible des habitations aux personnes à faible revenu, il lui faut trouver des formules adaptées. En 2019, il est le premier à livrer des logements via un « bail réel solidaire », un dispositif qui permet de vendre le bâti en le dissociant du foncier. « C'est une manière de faire baisser le coût pour les acheteurs qui verseront en complément une redevance mensuelle au propriétaire du terrain, en l'occurrence un organisme foncier solidaire (OFS), le deuxième agréé en France, là encore sous forme d'une Scic dont le COL est le sociétaire majoritaire. » Un montage sophistiqué qui fait donc intervenir deux Scic (Le COL et l'OFS) et qui montre comment la coopérative a su s'approprier rapidement des créations juridiques récentes : la Scic date de 2002, le bail réel solidaire de la loi ALUR de 2014 et l'OFS de la loi Macron de 2016. Une clause antispéculative permet de s'assurer que les logements achetés ainsi sous les prix du marché ne pourront être revendus que pour de la résidence principale, à un prix encadré et à des personnes avec un plafond de revenu. Jean-Baptiste Darroquy le dit clairement : « Ça nous a tout de suite plu ! C'est le moyen de garantir que nos enfants et petits enfants pourront toujours acheter dans ces zones difficiles et que notre région ne deviendra pas une sorte de Monaco ! » Depuis, beaucoup d'opérateurs en France ont adopté ce dispositif et ils sont nombreux à solliciter le COL sur son expérience.
SCIAPP
Autre innovation, plus complexe encore : la société civile immobilière d'accession progressive à la propriété (SCIAPP). Une sorte de location-vente qui passe par l'acquisition de parts dans une SCI spécifiquement créée à cet effet et gérée par le COL, qui débouchera sur la pleine propriété pour les locataires à l'échéance d'une quarantaine d'années. Si entre-temps ils quittent leur logement ils peuvent récupérer leurs parts. « Un système particulièrement adapté pour des personnes qui n'ont pas accès au crédit et que nous sommes pour l'instant les seuls, avec un autre organisme à Toulouse, à avoir mis en œuvre » explique Jean-Baptiste Darroquy qui poursuit en égrenant les autres cordes que le COL a à son arc, comme les 28 projets livrés ou en cours d'habitats participatifs – une autre innovation de la loi ALUR – portés par la Scic. Adepte des solutions innovantes, hybrides et participatives qui mobilisent acteurs locaux de l'ESS et communes, le COL qui affiche comme slogan « Basse consommation, haute solidarité », a un credo : « Tout ce qui peut créer le monde de demain en matière de logement, on le fait ! »