Christophe Von Roye, Directeur général de Copeport
COOPERATIVE MARITIME

Christophe Van Roye

Directeur général de Copeport

Se diversifier en gardant son ADN coopératif

Copeport est une coopérative maritime située à Port-en-Bessin (Calvados). Elle a été fondée par des pêcheurs normands en 1949 pour reconstruire les flottilles de pêche endommagées par la guerre et répondre à de nouveaux besoins des pêcheurs. Malgré des problèmes liés à la hausse des carburants dans les années 2000, Copeport est aujourd’hui en bonne santé économique, avec 911 sociétaires, 15 millions d’euros de chiffre d’affaires et 60 salariés.

« Au sortir de la guerre, des pêcheurs de la Manche ont mis ensemble leurs outils et leurs moyens pour reconstruire au sein d’une coopérative maritime et fédérer les énergies. Quelle que soit la taille des artisans, on respecte le principe un homme/une voix au sein de la coopérative. Se rassembler en coopérative a permis de fournir au long des années produits et services aux pêcheurs. A l’origine, cela a démarré par la construction de caisses en bois pour le poisson, puis Copeport a proposé des services d’écorage (c’est-à-dire toutes les activités liées au tri, au décompte et à la criée), d’avitaillement (c’est-à-dire les prestations d’achats-ventes de matériel de pêche). Enfin, nous avons aussi créé une usine à glace pour la conservation, une forge marine et un atelier de peinture. Nous voulons faire entrer la pêche artisanale dans le XXIe siècle.

« Sans regroupement coopératif, certains sites de pêche n’existeraient plus. »

Avec la crise de la pêche dans les années 2000, des petites coopératives du littoral normand se sont trouvé en difficulté. Nous avons pris la décision de les absorber en 2008, pour conserver les activités de pêche portuaire à Grandcamp-Maisy, Granville et Cherbourg. Chaque pêcheur dans ces coopératives est devenu sociétaire de Copeport. Pour maintenir l’ADN coopératif, nous avons décidé d’organiser des conseils d’administration régionalisés, pour être au plus proche des sociétaires. Quatre fois par an, nos administrateurs sont donc amenés à se déplacer pour animer des CA décentralisés. Sans ces regroupements et sans ce mode d’organisation, ces sites portuaires sur lesquels nous avons maintenu un responsable, n’existeraient plus et nous ne serions pas parvenus à maintenir notre niveau de services pour les pêcheurs.

Notre croissance externe ne s’est pas arrêtée là, puisque nous avons créé des structures annexes comme le Comptoir de la Mer, (qui n’est pas une coopérative) pour proposer aux particuliers des produits de toutes sortes, liés à la mer. Nous ne pouvions pas le faire dans le cadre de la coopérative, car une coopérative maritime doit réaliser 80 % de son chiffre d’affaires avec ses sociétaires, qui sont donc aussi ses clients. Le Comptoir de la Mer et d’autres structures nous ont ainsi permis d’améliorer nos résultats. On ne fait pas de redistribution aux sociétaires ; on capitalise dans la coopérative, ce qui nous autorise à faire régulièrement de nouveaux investissements. Copeport a choisi de travailler sur l’amélioration de la performance économique des pêcheurs et sur la pérennité des outils de travail. On n’oublie pas nos racines coopératives, et on se projette plus loin.

« Nous sommes très impliqués dans le développement local. »

Les deux ports de Port-en-Bessin et de Grandcamp-Maisy travaillent en délégation de service public. Cela signifie aussi que nous sommes très impliqués dans le développement local. Notre approche culturelle nous fait travailler avec l’ensemble des publics qui sont liés à la pêche. Depuis l’origine, nous portons une attention particulière aux femmes de pêcheurs : elles sont employées pour le tri du poisson, ce qui leur prodigue des compléments de revenus. Nous sommes également en lien avec les publics jeunes, via les formations initiales aux métiers de la mer. Une de nos problématiques actuelles est d’ailleurs d’attirer les jeunes vers nos professions et de renouveler régulièrement notre flottille de petits bateaux.

En dehors de notre auto-financement, qui passe par l’augmentation de notre chiffre d’affaires, nous recherchons aussi de nouveaux leviers de financement. Du côté de notre CA, nous continuons à offrir de nouveaux services aux pêcheurs, ce qui leur assurera les meilleurs débouchés auprès de la grande distribution : élévateur à bateaux, flotte de trois navires pour aller en mer chercher les poissons et les rapporter à la criée, station de révision des radeaux de survie. Du côté des nouvelles pistes, nous cherchons à trouver de nouveaux clients pour notre atelier de peinture des carénages ; avec la création d’un parc éolien à Courseulles-sur-Mer, nous allons offrir nos services pour les bateaux de services qui s’en occuperont. Enfin, nous cherchons à trouver de nouvelles ressources pour l’achat des bateaux et à inventer de nouveaux outils financiers, comme des sociétés d’investissement régionales ou des sites de financement participatif. Ce sera une nouvelle manière de favoriser la transmission. »

Janvier 2016