Agora des Scic 2022 : atouts et perspectives d’un modèle entrepreneurial territorial
L’Agora qui célèbre les 20 ans du statut des Sociétés coopératives d’intérêt collectif s’est tenue le 13 octobre au Conseil économique, social et environnemental. Occasion pour les Scic de témoigner de leur vitalité et pour les décideurs publics de réaffirmer l’intérêt de ce modèle entrepreneurial pour les territoires.
Ce modèle entrepreneurial « d’une modernité incroyable » a des atouts pour répondre aux défis à l’échelle du territoire et nécessite des politiques publiques fortes sur la durée.
La Scic, un modèle coopératif qui rayonne
Dans sa carte blanche, Caroline Naett, secrétaire générale de Coop FR, est intervenue au nom du mouvement coopératif qui a porté dans son ensemble la création du statut Scic jusqu’à l’aboutissement de la loi de 2001. Elle est le résultat de plusieurs années de mobilisation de nombreux acteurs, dont le Groupement National de la Coopération (ancien nom de Coop FR) et le Conseil supérieur de la coopération.
Inspirée lors de sa création par des initiatives de « coopératives sociales » développées en Italie et d’autres pays européens, la Scic est aujourd’hui un statut qui nous est envié et source d’inspiration dans le monde entier. Elle contribue pleinement au rayonnement mondial du mouvement coopératif français – l’un des premiers mouvements mondiaux en termes de poids économique et social.
La coopérative se caractérise généralement par l’unicité de son sociétariat – agriculteurs, artisans, consommateurs qui partagent un même métier ou besoin et se regroupent pour y répondre collectivement. Le statut Scic est original par sa caractéristique, unique au sein du monde coopératif, de multisociétariat. Aucun autre statut n’a vocation à regrouper les différentes parties prenantes autour d’un objet commun.
Le modèle coopératif est une réponse aux besoins actuels de la société. Il permet d’explorer, expérimenter et inventer les nouveaux usages : nouveaux modes de travail avec les coopératives d’activités et d’emploi, nouveaux modes d’habitats avec les coopératives d’habitants, nouveaux modes de consommation avec les supermarchés participatifs…
La Scic, un collectif multipartenarial
Depuis 2017, on assiste à une croissance incroyable (+88% en 5 ans) des Scic. Jacques Landriot, président de la Confédération Générale des Scop et des Scic, se réjouit également du nombre croissant de collectivités locales dans le sociétariat des Scic (47%).
Les témoignages d’Enercoop, fournisseur d’électricité verte et de Trans’fairRH, coopérative de conseil et de formation, ont illustré les enjeux de l’animation de la vie coopérative, de l’information à la prise de décision collective. Un véritable sujet d’éducation populaire !
Pour Amina Béji-Bécheur, Professeure à l’Institut de recherche en gestion, Université Gustave Eiffel, la Scic est un laboratoire d’expérimentation pour la gestion. Cette innovation sociale nécessite de construire de nouveaux indicateurs de performance. Le solidarisme vient en effet contredire, remettre en question le capitalisme.
A la question posée dans la salle « les Scic doivent-elles assumer leur radicalité, leur rôle dans la transformation de la société ? », Fatima Bellaredj, déléguée générale de la CG Scop et Scic, répond que pour peser, il faut faire masse. Nous n’en sommes pas là.
Exemple des Licoornes, groupement de 9 Scic
La Scic, une réponse aux défis à l’échelle des territoires
Les Scic ont véritablement décollé lorsque la dimension territoriale est devenue centrale, selon Hugues Sibille, président du Labo de l’ESS et ancien délégué interministériel à l’ESS. Depuis la loi ESS de 2014, les collectivités sont présentes à 47% dans le sociétariat des Scic. Pourtant elles ne siègent pas toujours. Railcoop, société coopérative de transport ferroviaire en Occitanie, et Clus’ter Jura, Pôle Territorial de Coopération Économique, ont témoigné de leur développement territorial, avec ou sans les collectivités.
« Pour réussir à accélérer le mouvement, il faut montrer ce que produisent les Scic sur le territoire et accompagner les territoires. » selon Emeline Baume, vice-présidente de Lyon Métropole et administratrice du RTES. Très applaudie lorsqu’elle a annoncé en direct que la Métropole de Lyon allait rentrer au capital de la Scic Railcoop !
Vincent Lourier, directeur des Coop’HLM, a également témoigné de la vitalité de ce statut au sein des coopératives d’HLM dont la moitié l’a adopté ! On compte 5 à 10 transformations par an dans le secteur du logement ! Dans 100% des Scic HLM, il y a des collectivités locales.
Le Sporting Club de Bastia en Scic !
Nouvelles perspectives
Le rapport IGAS-IGF publié en 2021 sur les Sociétés coopératives d’intérêt collectif et les coopératives d’activités et d’emploi a permis d’identifier les leviers de développement du statut. Anne Laurence Petel, députée du Rhône, ancienne présidente du Groupe d’études ESS à l’Assemblée nationale, a co-construit une proposition de loi à partir du rapport IGAS auquel elle a collaboré, afin de sécuriser le statut des Scic, la place du salarié, la sécurisation du dirigeant et l’évolution du financement. Elle est en attente d’une niche parlementaire. « Ce modèle entrepreneurial est mal connu donc il faut engager un vrai dialogue et une explication de texte. » Les Scic sont, selon la députée, un modèle extrêmement pertinent sur le territoire par son multisociétariat, son projet de territoire et sa capacité à développer des logiques de filières.
« Les Scic sont un modèle extrêmement pertinent sur le territoire. », A.-L. Petel, députée du Rhône
Pour Florence Blatrix, sénatrice de l’Ain et présidente du Groupe d’études ESS au Sénat, il s’agit de « promouvoir un modèle de coopération plutôt que de domination », à l’instar des plateformes coopératives, réunies au sein des Licoornes.
« La Scic rend le territoire collectivement intelligent. », F. Blatrix sénatrice de l’Ain
« Les Scic permettent d'aborder aujourd'hui des enjeux de transitions avec les acteurs locaux : alimentation, énergie... », selon Jérôme Saddier, président d’ESS France. « La Scic est un outil de reconquête pour travailler un entreprendre autrement. »
Pour Benoît Hamon, ancien ministre de l’ESS, ce modèle coopératif est d’une incroyable modernité ! Mais il a besoin de politiques publiques.
Marlène Schiappa, secrétaire d’Etat à l’Economie sociale et solidaire et à la Vie associative, a clôturé la journée avec la volonté de « passer de la marge à la page » ! « Les Scic font preuve d'une belle vitalité, preuve d'un véritable engouement. Cela ne doit rien au hasard car elles concilient efficacité économique et utilité sociale. » Pour la ministre, la Scic est un modèle de décloisonnement. Il faut lever des contraintes réglementaires et simplifier les démarches administratives.
PROGRAMME DE LA JOURNÉE [lien]